Dans un arrêt récent de la cour d’appel de Douai, le contrat de travail d’un salarié qui avait été embauché en qualité de salarié polyvalent en CDDI a été requalifié en CDI en raison de l’insuffisant accompagnement de la structure.

En effet, les juges ont considéré que la structure n’apportait pas de preuves suffisantes pour démontrer les mesures qu’elle avait prise en matière d’accompagnement. Or, en se fondant sur l’article L. 5132-15 du code du travail, la cour d’appel a rappelé que les ACI qui ont pour missions :

  • d’assurer l’accueil, l’embauche et la mise au travail sur des actions collectives des personnes sans emploi rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières ;

  • d’organiser le suivi, l’accompagnement, l’encadrement technique et la formation de leurs salariés en vue de faciliter leur insertion sociale et de rechercher les conditions d’une insertion professionnelle.

La cour d’appel estime donc que découle de ces missions l’obligation dans le cadre d’un CDDI de faire des actions de suivi, d’accompagnement et de formation du salarié. « Cette obligation à la charge de l’employeur constitue une des conditions du dispositif d’insertion par l’activité économique à défaut de laquelle la relation de travail doit être requalifiée en contrat de travail à durée indéterminée de droit commun ».

En l’espèce, un salarié en CDDI disait ne pas avoir bénéficié d’un accompagnement suffisant. Dans les faits, il avait été embauché du 1er juin 2015 au 31 mai 2016 (avec un renouvellement de son contrat) et avait été arrêté en raison d’un accident du travail et d’une rechute du 4 juillet 2015 au 14 septembre puis du 18 mars 2016 au 31 mai 2016 (il avait donc été présent de manière effective pendant 6 mois). Il avait apporté comme preuve une attestation de pôle emploi indiquant qu’il n’avait pas bénéficié d’une formation pendant sa période d’embauche. De son côté, la structure :

  • produisait un PV de comité de pilotage de janvier 2015 et mai 2016 indiquant que le salarié souhaitait s’orienter vers le métier de boulanger. Dans ce PV, il était mentionné des relances pour que le salarié choisisse des entreprises afin de réaliser une période d’immersion dans ce domaine mais la structure déplorait qu’il n’avait fait aucune démarche.

  • indiquait qu’elle avait réalisé un RDV en septembre 2015 et un RDV le 25 mai 2016 (le CDDI ayant pris fin le 31 mai). Cette preuve avait été apportée en produisant l’agenda de l’ASP.

  • indiquait qu’elle avait relancé à plusieurs reprises le salarié pour qu’il lui indique plusieurs structures pour effectuer l’immersion. Ceci étant, la structure n’avait pas été en mesure d’apporter des preuves concernant ces relances

  • produisait plusieurs attestations. de salariés (CIP, accompagnateur et encadrant) indiquant que l’accompagnement avait été fait et que des adaptations à son poste de travail avaient été mises en oeuvre à la suite de son accident du travail.

La cour d’appel a considéré que ces éléments n’étaient pas suffisants pour démontrer l’accompagnement  :

  • selon la cour, 2 entretiens étaient insuffisants au regard de la mission de l’ACI d’autant que le 2ème entretien avait eu lieu quelques jours avant la fin de son contrat alors même que la décision de ne pas renouveler le CDDI avait déjà été prise une quinzaine de jours avant l’entretien ;

  • la structure ne mentionnait pas les modalités des relances évoquées et n’apportait pas la preuve des conseils apportés

  • la structure ne démontrait pas que des entretiens avaient eu lieu entre l’ASP et le salarié en insertion d’octobre à mars (soit pendant 5 mois consécutifs)

  • Les raisons pour lesquelles l’immersion n’avait pas été faite n’avaient pas été analysées au sein de la structure.

La requalification du CDDI en CDI a eu des conséquences également sur la rupture puisqu’elle n’était plus justifiée (en effet, en considérant que le salarié était en fait employé en CDI, la rupture en raison de l’arrivée du terme du CDDI devenait sans objet). Étant donné que le salarié était en arrêt pour accident du travail, la cour d’appel a prononcé la nullité du licenciement et son irrégularité et a condamné la structure a une somme totale de 15.489 euros (soit 12 mois de salaire …).

Au vu de cette arrêt, il apparait donc indispensable de conserver une preuve des diligences accomplies pour vos salariés en insertion et d’organiser des entretiens réguliers d’accompagnement.

Références de l’arrêt : CA de Douai, 26 novembre 2021, RG n°18/03019

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *